19. L'effet placebo : la force
de la croyance
“ Le placebo c’est de l’espoir
en comprimé. ” Norman Cousins.
“ (...) esprit et corps sont unis
par des molécules messagères, chaîne commune
de communication entre émotions, sensations, pensées
et images conscientes d’une part, et mécanismes
génético-moléculaires du corps d’autre
part. ” Ernest Rossi (108)
“ La conviction devient biologie. ” Norman
Cousins. (109)
Développez des croyances favorables à votre état
de santé concernant votre alimentation, votre hygiène
de vie, votre adaptation, vos ressources personnelles, etc.
Étymologiquement, placebo veut dire "je
plairai". Il s’agit de sucre, de sérum physiologique...
sans incidence sur l’organisme. La majeure partie des recherches
scientifiques compare l'effet d'un médicament à un
placebo. Cela permet de déterminer qu'elle est la part
de l'effet des molécules par rapport à celui que
l'esprit exerce sur la guérison.
L’un des récits les plus poignants
est évoqué dans la publication du Docteur Klopfer.
(110)
Il y raconte l'histoire de Mr Wright, un homme
qui était atteint d'un lymphosarcome. Il s'agit d'un cancer
des ganglions lymphatiques.
Malgré le stade très avancé de
sa maladie — son pronostic de survie était de deux
semaines — Mr Wright espérait qu'un nouveau traitement,
le Krébiozène, le tirerait d'affaire. Il avait
lu des articles à ce sujet. Dans toute la communauté scientifique,
ce médicament était porteur d'un immense espoir.
Il supplia son médecin de lui administrer ce traitement
qui n'en était qu'à une phase expérimentale.
Devant l'insistance de son patient qui y voyait
une "occasion inespérée" de revivre,
Klopfer accepta en dépit du fait que son patient était
mourant.
Une semaine après, ses masses tumorales
de la taille d'une orange s'étaient complètement
résorbées. Au bout de dix jours, Mr Wright avait
quitté l'hôpital et repris toutes ses activités.
Après deux mois de santé quasi
parfaite, les résultats de l'étude portant sur
ce nouveau médicament furent publiés. Ils étaient
des plus décevants. Cela affecta considérablement
le moral de Mr Wright. En peu de temps, les mêmes symptômes
se développèrent à nouveau.
Le Docteur Klopfer eut alors l'idée
d'utiliser la dimension d'espoir qu'avait suscitée le
traitement.
Il affirma à son malade : "Un nouvel arrivage de médicament
particulièrement pur et superactif doit nous parvenir demain et
avec cela nous pourrons au moins égaler les effets bénéfiques
produits par les premières injections."
Mr Wright se raccrocha à ce nouvel espoir, " fut
transporté de joie et rempli de confiance."
A nouveau, en dépit d'un stade pratiquement terminal, les tumeurs
fondirent et le malade recouvra une bonne santé encore plus rapidement
que la première fois.
Son cancer avait disparu. A nouveau, il reprit
ses nombreuses activités sans plus souffrir d'aucun symptôme.
Le caractère étonnant de cette
histoire tient au fait que le Krébiozène "hyperactif" n'a
jamais existé. Son médecin lui a simplement injecté en « grandes
pompes » de l'eau distillée.
Le médicament actif n'était
en réalité que son ferme espoir de voir disparaître
la maladie.
Hélas, cet effet placebo fut détruit
deux mois après par la publication des derniers résultats
de l'étude. Le communiqué concluait que "les
tests conduits dans l'ensemble du pays démontrent que
le Krébiozène n'a aucun effet dans le traitement
du cancer."
Mr Wright mourut quelques jours après avoir pris connaissance
de cette annonce.
Cette histoire étonnante et tragique
montre la force de la croyance. De nombreux récits assez
semblables sont répertoriés pour presque toutes
les maladies. A chaque fois, l’intime conviction de la
personne joue un rôle déterminant dans sa guérison.
Il est surprenant que cet axiome ne soit pas
davantage étudié par la science médicale.
Si le processus de rémission et ses déterminants
psychiques étaient élucidés, les progrès
en matière de santé publique seraient considérables.
Les médecins pourraient user de tout leur pouvoir pour
entretenir la croyance des malades en leurs propres capacités
de guérison plutôt qu’en espoir et en foi
pour la toute puissance médicale.
Henri Beecher passe en revue les 15 principales études
comparatives entre traitement médical et placebo.
La “ puissance de l’attente
confiante ”, (111) partie intégrante de l’effet
placebo, permet d’observer un soulagement pour environ
35% des malades quel que soit le type de pathologies. (112)
Ce chercheur réalise par la suite une étonnante étude
: il divise en deux groupes des malades devant être opérés
afin de subir un pontage du cœur. Le premier groupe est
effectivement opéré. Les malades du second groupe
sont simplement ouverts puis recousus. Il est précisé à tous
que l’intervention s’est déroulée dans
son intégralité et avec succès. Les analyses
ultérieures montrent qu’ils n’y a pas de différence
significative entre les deux groupes et que tous les patients
se portent bien. (113)
L’effet d’annonce de l’intervention
semble avoir mis en œuvre des processus physiologiques
de récupération qui dépassent toutes les
espérances.
Il est possible que ce même effet placebo
détermine en partie les succès observés
par les guérisseurs et les chamans de tous pays. À l’inverse
les envoûtements et autres ensorcellements sont peut-être
liés à l’intériorisation de croyances
négatives produisant alors un effet nocebo.
Une étude fameuse sur un cas de placebo
devenu nocebo est citée par Norman Cousins. 411 personnes
furent informées du fait qu’elles risquaient de
perdre leurs cheveux à la suite de leur traitement de
chimiothérapie. (114)
“ A 30% d’entre eux on administra,
sans qu’ils le sachent, des placebos à la place
de la chimiothérapie et ils perdirent leurs cheveux, bien
que les cachets qu’ils avaient absorbés ne continssent
aucun médicament. ” (115)
La puissance d’une croyance positive
ou négative détermine, en fonction de sa propre
adhésion, des effets sur la physiologie.
Evans réalise lui aussi un état
des recherches sur les placebo et la douleur. (116)
Au travers de onze études réalisées
en double-aveugle, il apparaît que 36 % des personnes souffrantes
sont soulagées en moyenne de 55 % de leur douleur.
En d’autres termes, pour plus d’un
tiers de la population, la force de l’espoir, par l'intermédiaire
d'un placebo, est en moyenne à 55 % aussi efficace qu'un
véritable médicament anti-douleur. Et cela est
vrai avec une remarquable constance y compris pour la morphine.
D’où l’idée que l’attente
de l’effet calmant peut générer spontanément
la production d’endomorphine ou autres substances opoïdes
endogènes, c’est-à-dire les substances calmantes
internes à l’organisme et dont nous disposons tous.
Comme le remarque Evans : “ Il vaut
la peine de noter que ce pourcentage d’efficacité ne
se limite pas à la comparaison entre placebo et médicaments
analgésiques. On le retrouve dans des études en
double-aveugle sur les techniques de traitement non médicamenteux
contre l’insomnie (58 %, selon 13 études) et les
médicaments psychotropes contre la dépression comme
les tricycliques (59 % selon 93 travaux cités par Morris & Beck,
1974) et le lithium (62 % selon 13 études reprises par
Marini, Sheard, Bridges & Wagner, 1976). ” (117)
La croyance en l'efficacité d'un
traitement semble des plus déterminantes quant au résultat
obtenu.
Une expérience fameuse sur la vitamine
C montre la force de la croyance investie dans le placebo :
“ Le groupe qui prenait
un placebo en croyant prendre de l’acide ascorbique a
eu moins de rhumes que le groupe qui prenait de l’acide
ascorbique et croyait prendre un placebo. ” (118)
Le placebo agit donc parfois mieux qu’un
traitement actif et reconnu, et ce, simplement en fonction de
l’effet d’annonce.
De façon générale, plusieurs
centaines d’études montrent qu’environ 35
% de personnes traitées avec ces substances inactives
font état d’amélioration, et ce, concernant
un grand nombre de maladies : douleurs diverses, migraines, fièvres,
infections ORL, angines de poitrine, allergies, asthme, ulcères,
acné et autres problèmes cutanés, verrues,
mal de mer et autres vomissements, arthrites, rhumatismes, diabète,
irradiation, maladies de Parkinson, scléroses diverses,
cancers, etc.
Des ouvrages entiers ont été écrits
sur ce thème. Il semble important que chacun réalise à quel
point la croyance en ses propres potentialités est un
moyen puissant de les susciter, notamment grâce aux techniques
de visualisation et d’auto-suggestion.
1°) Utilisez vos ressources
personnelles pour accroître l’effet de vos éventuels
traitements. En prenant vos médicaments, visualisez
leurs effets bénéfiques sur votre organisme.
Représentez-vous la stimulation de vos défenses
immunitaires grâce au traitement.
2°) Si aucun médicament ne vous
est prescrit pour enrayer vos troubles, concentrez votre attention
sur l’effet bénéfique de l’eau ou
des aliments que vous absorbez. Imaginez leur action de régénération
cellulaire pendant votre repas. De même, absorbez-vous
dans la visualisation de votre respiration. Imaginez son action
nourricière, immunisante, propice à la santé.
Utilisez tous les moyens qui s’imposent à votre
imagination pour développer vos propres capacités
d’auto-guérison. Au besoin, faites-vous
aider par un professionnel
de l'hypnothérapie pour y parvenir.
________________________________________
(108) Rossi E. (1994). Psychobiologie
de la guérison. Seuil. 447 p. ( p 42).
(109) Cousins N. (1991). La
biologie de l'espoir. Seuil. 438 p. (p 269).
(110) Klopfer B. (1957). Psychological
variables in human cancer, Journal of Projective Techniques,
21, 331-340.
(111) Frank J. (1975). The
faith that heals. John hopkins university medical journal 137.
(112) Beecher H. K. (1955).
The powerful placebo. Journal of the american medical association,
159, n° 17.
(113) Beecher H. K. (1961).
Surgery as a placebo. Journal of the american medical association,
176.
(114) Fielding J. W. L., Fagg S. L.,
Jones B. G., Ellis S., Hockey M. S., Minawa A., Brookes V.
S., Craven J. L., Mason M. C., Timothy A., Watherhouse J. A.
H. & Wrigley P. F. M. (1983). An interim report
of a prospective, randomized, controlled study of adjuvent
chemotherapy in operable gastric cancer : british stomach cancer
group. World journal of surgery. p 390-399.
(115) Cousins N. (1980). La
volonté de guérir. Points Actuels. 155 p.
(p 270).
(116) Evans F. (1985). Expantancy,
therapeutic instructions, and the placebo response, in : L. White,
B. Tursky & G. Schwartz (Eds). Placebo : theory, research,
and mechanism. p 215-228. New York, Guilford.
(117) Evans F. (1985).
Expantancy, therapeutic instructions, and the placebo response,
in : L. White, B. Tursky & G. Schwartz (Eds). Placebo
: theory, research, and mechanism. p 215-228. New York, Guilford.Cité par Rossi
E. (1994). Psychobiologie de la guérison.
Seuil. 447 p. (p 35-36).
(118) T. C. Chalmers. Cité par Cousins
N. (1980). La volonté de guérir.
Points Actuels. 155 p. (p 41).
: Hypnothérapie
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