35. La santé et la raison
de vivre
Tout au long des séances individuelles
ou collectives que je réalisais, j’observais une
constante : les difficultés psychologiques ou somatiques
sont en étroite relation avec un manque ou un défaut
de réalisation personnelle ou professionnelle, d’investissement
dans la vie, un manque d’amour pour soi et pour les autres.
L’absence d’objectifs, de buts, d’idéal
et de satisfaction génère souvent l’apparition
de symptômes. D’où la nécessité de
recréer en soi une raison vitale d’exister ; se
donner les moyens de se réinvestir progressivement dans
le plaisir de vivre.
« J’ai décidé d’être
heureux parce que c’est bon pour la santé. (...)
Il faut cultiver son jardin. » Voltaire
Déterminer de nouveaux objectifs
existentiels, mêmes modestes, est vital, a fortiori
quand on n’en a plus. Apprenez à vous aimer, à respecter
vos besoins, vos envies et vos désirs. Cultivez
votre vitalité et votre réalisation au quotidien.
Parfois, l’imminence de la mort peut
générer un sursaut d’énergie vitale,
ce qui a été le cas pour Alain et a déclenché son
voyage en Inde, puis sa lutte farouche contre le sida.
Au terme d’une vie bien remplie, la motivation
n’est plus la même...
Viéra - ce qui signifie "foi" en russe
- est née en 1899 à Kharkov, en Russie. Et toute
sa vie, elle fut investie dans la foi orthodoxe et pratiqua sa
croyance pour toute sa famille. Cette foi l’a aidé à traverser
bien des épreuves que lui a réservées son
existence.
La révolution avait éclaté depuis
trois ans. Elle se maria à l’âge de 21 ans
avec Alexandre, qui était promu à une carrière
d’avocat. En pleine guerre civile, plusieurs membres de
sa famille ont été fusillés. De souche noble,
ils devinrent de plus en plus clairement menacés par les
bolcheviques. Ses parents et son mari décidèrent
d’émigrer et se lancèrent dans un périple
pour leur survie qui les conduisit en Turquie puis en Grèce,
avant d’arriver à Paris en 1921.
Alexandre devint porteur de valises à la
Gare de l’Est, puis ayant rassemblé quelques économies,
s’installa à son compte comme chauffeur de taxi.
Viéra travailla en usine, enseigna le français
aux russes immigrés et s’investit dans de petits
boulots leur permettant de boucler, tant bien que mal, leurs
fins de mois. Les terribles épreuves de leurs vies les
obligèrent à se
battre pour survivre, les fortifièrent dans l’envie
de s’en sortir.
Les liens entretenus avec la communauté russe
de Paris constituèrent le ferment d’une existence
sociale solidaire et riche. Ils traversèrent le racisme,
lié à leur condition d’immigrés, la
pauvreté, la seconde guerre mondiale...Ils eurent deux
fils qui se marièrent et eurent des enfants à leur
tour.
Alexandre travailla jusqu’à l’âge
de 80 ans. Je connus peu mon grand-père, mais je constatai
que son travail était devenu sa raison de vivre. Dès
qu’il l’arrêta, il tourna en rond à se
demander ce qu’il pourrait bien faire et ne trouvant pas
de réponses, il se désinvestit progressivement
de l’existence. Il passa alors l’essentiel de son
temps devant la télévision. Il mourut deux ans
plus tard.
Ma grand-mère - Babouchka Viéra
- se réfugia alors davantage encore dans la religion et
participa activement à toutes les messes et autres manifestations
de son église. Elle était appréciée
de tous. Ses implications religieuses et sociales l’aidèrent à faire
son travail de deuil. En famille, son expérience et son
ferme caractère en faisaient une conseillère avisée
qu’il valait mieux ne pas contredire. Elle devint le pilier
fondateur de la famille. J’allais déjeuner chez
elle une à deux fois par semaine. En véritable
cordon bleu, elle me préparait avec son amour nourricier
de délicieuses recettes de la lointaine Russie.
Mon père mourut en 1990 des suites d’une
intervention chirurgicale. Ingénieur hyper investi dans
son travail, il ne se remit jamais de son licenciement. Sa volonté de
vivre s’éteignit avec le temps. La perte de son
fils cadet constitua pour ma grand-mère sa plus dure épreuve.
Aidée par toute sa famille, ses amis et les ecclésiastiques
de son église, elle surmonta avec le temps son inconsolable
chagrin. À ceux qui demandaient de ses nouvelles elle
répondait avec un sourire triste : “ Ça
va. Il faut bien ! ”
Elle s’absorbait dans de longues prières
qui l’aidaient à prendre de la distance par rapport à sa
souffrance. Avec mon frère et ma sœur, nous déjeunions
régulièrement chez elle. Au fur et à mesure
que son âge progressait, ses possibilités de se
déplacer diminuaient. Elle entendait et voyait de moins
en moins bien, pourtant, elle continuait à vivre seule
dans son petit appartement, aidée par une femme de ménage
et une infirmière et tenait à son autonomie plus
qu’à toute autre chose.
Dans le même temps, son art de la cuisine
ne faisait que se perfectionner. Nous comprîmes que ses
seules joies, ses seules raisons de vivre étaient devenues
la prière et le fait de nous recevoir en nous régalant
de ses exquis petits plats. Il lui fallait parfois plusieurs
jours pour en préparer un. Même si elle nous disait
souvent que la vieillesse n’est pas une partie de plaisir,
son esprit restait étonnamment vif.
Elle s’intéressait à tout
ce qui nous concernait. Sa mémoire prodigieuse nous éblouissait.
Elle n’oubliait jamais la fête ou l’anniversaire
de l’un d’entre nous, nous demandait des nouvelles
de nos amis qu’elle n’avait vus qu’une seule
fois et rectifiait parfois des points de détails qui nous
avaient échappé.
Un souvenir s’impose à moi pendant
que j ’écris ces lignes : Alors que je partais
faire un tour d’Europe en moto, je me retourne et lance à ma
grand-mère un signe d’au revoir de la main. Je l’aperçois à sa
fenêtre ouverte me regardant avec un air grave et déployant
un ample signe de croix avec ses doigts. Sa bénédiction
me fit forte impression. Je me sentis protégé comme
par un ange gardien auquel m’aurait confié ma grand-mère.
J’avais vraiment l’impression qu’il ne pouvait
rien m’arriver, à condition bien sûr, de rester
vigilant à chaque seconde de conduite. Mais parfois, notamment
au sud de l’Espagne, j’ai eu le sentiment d’être
en pilote automatique, roulant en toute confiance sans que cela
soit vraiment moi qui conduise. Le voyage se déroula pour
le mieux sans l’ombre d’un incident après
les huit mille kilomètres sillonés jusqu’à Malaga,
puis Venise, Belgrade, Lausanne et Paris.
Peu de temps après que j’ai retrouvé ma
chère grand-mère, alors âgée de 98
ans, elle fit une mauvaise chute et s’entailla la main.
Une intervention chirurgicale avec anesthésie générale
fut nécessaire. Pendant sa convalescence, une partie de
la famille estima qu’elle serait plus en sécurité en
maison de retraite. Elle s’y refusa tout d’abord,
puis de guerre lasse, finit par accepter.
Avec mon frère et ma sœur, nous
nous battîmes vertement contre cette idée, tentant
d’organiser une aide permanente à domicile. Je ne
pouvais accepter cette solution ultime car je savais à quel
point il lui était nécessaire de continuer à se
rendre utile pour continuer à vivre. Compte tenu
de sa personnalité, je savais trop bien que la maison
de retraite lui serait fatale à court terme.
La famille passa outre notre détermination
et elle fut placée dans une magnifique institution russe,
non loin de Paris. Je passais la voir une fois par semaine et
constatais qu’elle y dépérissait. Plus rien
ne la retenait à la vie, elle avait le sentiment de ne
plus jouer de rôle dans la famille ni ailleurs. Elle me
confia qu’elle aurait bien sûr préféré rester
chez elle, mais qu’il était sans doute plus raisonnable
pour elle d’être là. Peu à peu son
intérêt pour la vie déclina. Elle attendait
la mort, paisible et résolue. Elle s’éteignit
un mois après, emportée par une leucémie
foudroyante.
Privée d’un objectif de
vie, si minime soit-il, toute vitalité s’épuise
progressivement. D’où l’importance de toujours élaborer
de nouveaux projets, de s’élancer dans de nouveaux
plans d’action à la fois pour soi mais aussi pour
les autres.
La difficulté de se réaliser,
majorée par la crise économique, peut, à la
longue, entraîner un découragement qui structure
une dépression, notamment pour les demandeurs d’emploi.
Le sentiment désagréable lié au fait d’être
inutile, peut céder la place à la cruelle impression
de devenir un boulet, un assisté de la société.
J’ai personnellement expérimenté cette
cruelle situation après quatorze années d’études
en sciences humaines. Pour les financer, j’ai toujours
exercé des boulots alimentaires (veilleur de nuit ou employé de
bureau, animateurs d’enfants ou surveillant dans un lycée...)
Après le DESS (qui m’a conféré le
titre de psychologue clinicien) et le DEA, j’entrepris
de trouver un travail dans le domaine de l’aide psychologique
et de la psychothérapie pour lesquels je me suis formé.
J’adressai des propositions, mais ne
me parvenaient que des réponses négatives. Après
deux ans de recherches infructueuses, et des centaines de candidatures
spontanées sans résultat, ma motivation s’abrasa,
perdit de sa substance. Personne n’avait visiblement besoin
de mes services. Dans le même temps, ma recherche doctorale
s’enlisait et je percevais les multiples résistances
du corps médical à mon égard. Cerise sur
le gâteau, je venais de rompre avec mon amie. Je me sentais
inutile et malheureux à un point infini. Je perdis tout
espoir. Le sens de ma vie m’échappa. Le simple fait
de continuer à vivre devenait superflu.
Avant d’envisager le pire, ou de risquer
une quelconque décompensation, je décidai de m’offrir
une ultime satisfaction. Je me demandai de quelle dernière
chose je pourrai encore avoir envie. Après réflexion,
je me dis qu’un bon massage thérapeutique serait
le plus indiqué.
Pour la première fois de ma vie, je
pris rendez-vous avec une praticienne de massage ayurvédique
(252). L’accueil de cette charmante et athlétique
jeune femme fut chaleureux. En confiance, je me focalisais sur
les sensations de mon corps modelé et réconforté par
ses habiles manipulations. Ses mains couraient sur ma peau huilée
en de savantes glissades. Je réalisais alors mon besoin
de contact. La satisfaction que me procurait le simple fait d’être
touché me fit retrouver mes esprits, me permit de concentrer
l’énergie vitale et de réagir.
En sortant de son lieu de consultation, je
me sentis plus vivant, plus alerte. L’attention et les
soins que me prodigua cette personne inconnue de moi quelques
heures auparavant me régénéra. Une confiance
nouvelle refleurit sur mon désinvestissement. L’espoir
de vivre encore de bons moments dans l’existence se fit
jour. J’y retournais une seconde fois et retrouvais pleinement
mon énergie vitale, l’envie de me réinvestir
avec mes dernières forces dans la concrétisation
de mes rêves.
De nombreuses pages d’écriture
me permirent de réaliser un constat : visiblement, aucun
hôpital, dispensaire ou autre structure ne voulait m’embaucher.
J’avais pourtant, plus que jamais, à cœur
d’aider les personnes en difficulté. Aussi, je décidai
de devenir bénévole dans une association susceptible
d’être intéressée par mon expérience.
Lorsque Alain me fit part de l’amélioration
de sa situation, je réalisais que la pratique de l'auto-hypnose
pouvait aider beaucoup de personnes initialement condamnées à mourir
du sida. Je pris contact avec l'association Aides et proposai
de créer un atelier de redynamisation. Mon projet fut
accueilli avec prudence et réserve par le comité directeur.
Toutefois, les nombreux articles collectionnés
pendant les jours que je passai en bibliothèque constituèrent
un argument décisif. Mon projet fut accepté et
je commençai à animer les groupes au sein d’Arc-en-Ciel
; une structure magnifique où se déroulent tout
un ensemble d’ateliers de bien-être.
1°) Faites
face à l’épreuve
que vous traversez. Regardez votre situation avec
objectivité. Pour vous y aider, écrivez ou
dessinez ce que vous vivez.
Si vous ressentez en vous de la colère,
de la haine ou tout autre émotion négative, expulsez-la
sur le papier.
2°) Une fois ce constat jeté sur
le papier, faites un exercice de relaxation et interrogez-vous.
De quoi avez-vous besoin à court terme ?
Imaginez ces petits riens de la vie qui
lui donnent toute sa saveur. Ces moments fugaces de joie que
l’on croise au détour d’un chemin et qui
illuminent le bonheur d’exister. Un peu comme si le champ
de la conscience s’élargissait jusqu’à embrasser
le monde.
Alors, dans un futur proche, qu’est-ce-qui
vous ferait envie ou plaisir ?
Mobilisez vos ressources et mettez
en place un plan d’action pour concrétiser ce
qui vous fera du bien. Donnez-vous les moyens de réaliser
ce qui vous tient à cœur.
3°) Déterminez les objectifs
que vous souhaiteriez réaliser à moyen et long
terme.
En état de relaxation, laissez venir à vous
tous les souhaits, projets, toutes les perspectives et ambitions
susceptibles de relancer en vous de fermes raisons de vivre.
Prenez conscience de la joie liée à votre réalisation.
Plongez dans ce sentiment. Imprégnez-vous de la certitude
de réussir. Imaginez ce que votre corps et votre esprit
pourront ressentir. Gravez ces émotions positives à l’intérieur
de vous...
Si des pensées parasites emplies
de doute ou de crainte se manifestent, focalisez-vous de nouveau
sur votre souffle et sur les sensations de votre corps. Recontactez
les sentiments positifs que suscite l’espoir de réussir.
Développez en vous l’espoir farouche de votre
réalisation.
De même que les chemins que vous
empruntez vous deviennent facilement familiers, ce cheminement
de pensée pourra vous être d’un précieux
secours dans les épreuves de l’existence. Il vous
sera alors plus simple de l’emprunter.
Ce trésor de ressources qu’est
votre inconscient pourra peut-être vous faire un signe
: un petit mouvement de l’une de vos mains, une sensation
corporelle particulière, une représentation au
niveau de votre esprit. Laissez venir les choses qui s’imposent.
Peut-être aurez-vous la surprise
de constater un mouvement réflexe en lien avec une pensée
spécifique. Ce signe est un signal de communication
de votre inconscient qui pointe une direction, révèle
un message que vous pouvez interpréter.
Si l’émotion qui y est associée
est douloureuse, elle révèle le travail que vous
avez à réaliser : l’acceptation de la
situation que vous traversez, du changement qui s’impose
, le deuil que vous avez à faire....
A l’inverse, l’émotion
de la joie associée à une pensée préfigure
le chemin à suivre en toute sérénité.
Elle ouvre les portes d’un nouvel espace de réalisation
au travers de sa raison de vivre. Un chemin lumineux d’espoirs,
de projets, et de concrétisations.
4°) Si le temps vous le permet, explorez
vos possibilités d’intervenir bénévolement
dans une association.
L’aide et l’amour que vous
apporterez aux autres vous enrichira d’une belle expérience
de vie et de partage.
Elle pourra recréer en vous une
implication personnelle motivante et de nouvelles raisons de
vivre.
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(252) Massage thérapeutique indien.
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