18. L’Espoir fait vivre
“ Traité d’anatomie pathologique,
manuel à l’usage des facultés. (...) : “ Dans
certains cas, assez rares, on assiste à des guérisons
spontanées. ” Vous vous rendez bien compte
? Des guérisons spontanées !... Un remous parcourut
la chambre. Il semblait que, de ce bouquin ouvert à la
page fatale, venait de s’envoler, tel un papillon bigarré,
l’espoir palpable de cette guérison spontanée,
et chacun tendait le front et la joue pour que le papillon bienfaiteur
l’effleurât dans son vol. ” Alexandre
Soljenitsyne. (96)
“ L’espérance de guérir
est déjà la moitié de la guérison. ” Voltaire.
“ Quand il n’y a plus d’espoir,
le plaisir de vivre s’en va ” Germinal. Émile
Zola.
Aux États-Unis, un médicament anticancéreux
baptisé EPOH a obtenu 22% de réponses positives.
Les mêmes molécules présentées comme
le traitement HOPE (Espoir en anglais) donne 74% de bons résultats.
(97)
Développer des croyances positives
emplies d’espoir et de gaieté est bénéfique à l’état
de santé.
Depuis l’antiquité, de nombreux
médecins ont observé le rôle parfois déterminant
de l’espoir et de la gaieté dans le processus de
guérison. L’un de ces précurseurs, Galien,
estime que les femmes gaies ont moins de cancers que les femmes
déprimées. Pour Hippocrate, l’esprit et le
corps s’inscrivent dans un continuum. Les joies ou les
souffrances de l’un retentissent sur l’autre.
Le rôle d’une attitude
psychologique orientée vers la gaieté et l’espoir
de voir sa situation s’améliorer est un puissant
catalyseur des processus de santé, comme l’ont
souligné de très nombreux auteurs.
En 1950, des psychologues ont mis en évidence
le fait que 70 à 80 % des personnes consultant en médecine
générale ont une attitude psychologique spécifique
avant de tomber malade. Cette attitude, baptisée "abandonnant-abandonnée",
se caractérise par un sentiment d'impuissance et de désespoir,
une image dépréciée d'eux-mêmes et
l'envie de tout abandonner. (98)
Sandra Lévy, psychiatre américaine
spécialiste du cancer qui a passé en revue des
dizaines de travaux de recherche parvient à d’éloquentes
conclusions :
"Les pourcentages de survie les plus faibles
correspondent à des états de dépression
ou d'impuissance, tandis que les pourcentages les plus élevés
correspondent à la volonté de réagir." (99)
Ce chercheur estime qu'une attitude de joie s'avère encore plus
importante que la combativité. (100)
C’est précisément ce qu’a
découvert en autodidacte l’un des pionniers de la
psycho-neuro-immunologie : Norman Cousins.
A l’âge de 10 ans, il fut atteint
d’une tuberculose. Dans le sanatorium où il fut
admis, il remarqua que deux groupes distincts de malades s’étaient
spontanément constitués :
- Les “ réalistes ” se basaient sur l’appréhension
de cette maladie souvent mortelle.
- « Les jeunes “ optimistes ” du
sanatorium ne cherchaient pas à discuter cette réalité.
Mais ils savaient que certains enfants étaient sortis vivants
de l’épreuve. Ce fait bien réel nourrissait leurs
espoirs et soutenait leur volonté de vivre. Particularité frappante,
bien plus d’“ optimistes ” réussissaient à vaincre
leur maladie que de “ réalistes ” ».
(101)
Alors qu’il avait 50 ans, il développa
une autre grave maladie : la spondylarthrite ankylosante. Une
maladie dégénérative du tissu conjonctif
qui provoque la désintégration de l’organisme
et notamment de la colonne vertébrale. A un stade avancé,
les douleurs extrêmes de cette maladie ne peuvent être
soulagées qu’avec de la morphine.
Selon les statistiques, Norman avait une chance
sur 500 de s’en sortir. Hospitalisé et souffrant
le martyre, il vit un jour à la télévision
un film drôle qui le fit rire aux éclats. La douleur
avait disparu comme par magie et ne revint que deux heures après
son rire.
Il devint convaincu de sa guérison imminente
et décida de regarder exclusivement des films drôles.
Comme il passait le plus clair de son temps à rire, le
personnel commença à trouver cela inconvenant pour
les autres malades. Norman déménagea dans une chambre
d’hôtel, proche de son hôpital. Il poursuivit
son traitement médical, auquel était associé de
fortes doses de vitamines C et de bonnes tranches de rigolade.
Il connut une rémission spontanée de sa pathologie
en un temps record. Il se passionna alors pour ce qu’il
avait découvert et écrivit un premier ouvrage dans
lequel il relate son expérience : “ La volonté de
guérir ”.
Ce précurseur suscita de nombreux courants
de recherche sur les effets bénéfiques du rire.
L'une d'elles portait sur 4 groupes de 10 étudiants
comparés quant à leur capacité de supporter
l'inconfort produit par le gonflement d'un brassard de tensiomètre.
Pendant ce temps, chaque personne écoute individuellement
une cassette de 20 minutes.
Le premier groupe écoute une cassette
humoristique, le second bénéficie de suggestions
de relaxation, le troisième d'une information et le quatrième
sert de groupe contrôle.
Les résultats indiquent que les personnes
capables d'endurer le plus d'inconfort sont ceux qui écoutent
l'enregistrement comique, immédiatement suivi par ceux
qui se livrent à la séance de relaxation. (102)
Dans le même ordre d'idée, une étude
indique que les personnes capables de faire preuve d'esprit spontanément
sont également capables de combattre les effets négatifs
du stress sur le plan émotionnel avec le plus d'efficacité.
(103)
Enfin deux autres recherches permettent de
constater, par référence à un groupe contrôle,
que le fait de regarder pendant une heure un film comique diminue
significativement les taux de cortisol et d'épinéphrine
(adrénaline) (104) et augmente la blastogenèse
(c'est-à-dire l'activation, la prolifération, la
capacité à être stimulé et la faculté de
réponse des lymphocytes). (105)
De façon anecdotique, Norman Cousins
relate dans son ouvrage : "La biologie de l'espoir" une étude
qu'il a réalisée sur lui-même :
"Je me demandai tout naturellement si
le contraire de la dépression - l'anticipation d'un événement
joyeux par exemple - pouvait accroître effectivement le
nombre de cellules immunitaires.
On me fit deux prises de sang. Le premier prélèvement servit
de référence.
Le deuxième fut effectué cinq minutes plus tard. Pendant
l'intervalle, j'essayai de me mettre dans une humeur joyeuse, et de ressentir
un bien-être émotionnel. (...)
L'avantage de cet intervalle de cinq minutes était que, si des
modifications survenaient effectivement, le rapport de cause à effet
serait établi. (...)
En cinq minutes seulement, l'augmentation moyenne des différents
constituants de mon système immunitaire avait été de
53 % en moyenne - depuis 30 %, chiffre le plus bas dans la proportion
du précurseur des cellules NK, jusqu'à une augmentation
de 200 % des cellules T imprégnées d'anticorps." (106)
Par ailleurs, l’optimisme apparaît
comme étant “ immunogène ” c’est-à-dire
qu’il exerce “ un effet protecteur contre l’apparition
d’une maladie ou l’évolution d’un processus
pathogène ” (107) , notamment dans le cas du
sida.
Le rire est donc un moyen de prévention
simple et naturel. De plus, il agit comme un antalgique et permet à certaines
défenses immunitaires d’augmenter dans des proportions
appréciables.
Toutefois, la vitamine C à fortes doses
avec laquelle Norman s’est automédiqué n’a
fait aucune preuve de son efficacité dans le cas de cette
pathologie. En fait, il comprend par la suite que l’élément
déterminant de sa guérison est sa croyance positive
et pleine d’espoir vis-à-vis de ce qui a été un
placebo.
1°) Contrecarrez la triste tendance
des pays les plus riches du monde qui rient de moins en moins. À croire
que disposer de richesse tue le sens de l’humour !
Procurez-vous de saines lectures : de Molière
en passant par Pierre Dac et de Coluche à Raymond Devos.
Plongez-vous dans le bonheur de rire à gorge déployée
le plus souvent possible.
2°) Organisez avec ceux que vous aimez
des sorties hilarantes pour voir des films et des spectacles
drôles. Constituez-vous une vidéothèque
des meilleurs films d’humour et de rire de Chaplin en
passant par Buster Keaton (sauf si son air affligé vous
rend morose) et de Bourvil à Smaïn...
3°) A la télévision préférez
les guignols aux tristes informations habituelles ; les comédies
aux tragédies.
4°) Faites provision d’histoires
drôles et entourez-vous de bons vivants. Donnez-vous
les moyens de rire chaque jour suffisamment. Cultivez votre
humour. Apprenez à faire rire et à rire de vous-même.
5°) Au risque de me répéter,
surtout, pensez à rire aussi souvent que possible
chaque jour. C’est très sérieux : ça
augmente les défenses immunitaires et renforce l’état
de santé.
________________________________________
(96) Soljenitsyne A. (1980). Le
pavillon des cancéreux. Press Pocket. 722 p. (p.
199-200).
(97) Bucholtz W. M. (1988).
Etude citée par Cousins N. (1991). La
biologie de l'espoir. Seuil. 438 p. p.131.
(98) Engel G. L. (1977). A
life setting conductive to illness : the giving-up-giving-up
complex, in : Annals of Internal Medecine, Août
1968.
(99) Levy S. M. (1984). Emotions
and the Progression of Cancer : a Review, in advances : Journal
of the institute for the advancement of health. p 10-15.
(100) Levy S. M., Lee J., Bagley C. & Lippman. (1988).
Survival hazard analysis in recurrent breast cancer patients
: seven year follow-up, in Psychosomatic Medecine, 50,
520-528.
(101) Cousins N. (1980). La
volonté de guérir. Points Actuels. 155 p.
(102) Cogan R., Cogan D., Waltz W. & Mc
Cue M. (1987). Effects of laughter and relaxation
on discomfort thresholds. Journal of behavioral medecine,
10, p 139-144.
(103) Martin R. A. & Lefcourt H.
M. (1983). Sense of humor as a moderator of the relation
between stressors and moods. Journal of personality and
social psychology, n° 45. p 1313-1324.
(104) Berk L.S., Tan S.A., Nehlsen-Cannarella
S.L., Napier B.J., Lewis J.E., Lee J.W., Fry W.F. & Eby
W.C. (1988a). Laughter decreases cortisol, epinephrine
and 3,4 dihydroxyphenyl acetic acid (Dopac). The Federation
of American Societies for Experimental Biology (FASEB).
Journal n°2, p. A1570.
(105) Berk L.S., Tan S.A., Nehlsen-Cannarella
S.L., Napier B.J., Lewis J.E., Lee J.W., Fry W.F. & Eby
W.C. (1988b). Humor associated laughter decreases
cortisol and increases spontaneous lymphocyte blastogenesis. Clinical
research, n° 36, p. 435A.
(106) Cousins N. (1980). La
volonté de guérir. Points Actuels. 155 p.
(p 295-296).
(107) Bidan C. (1995). Approche
biopsychosociale de l’infection au virus VIH : une revue
de la littérature. Réalisé pour l’Agence
Nationale de Recherches sur le Sida (ANRS).
: Hypnothérapie
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